Pur délice

Porsche Suisse : Périple culinaire. Une tournée des cols de l’Engadine en Porsche 718 Cayman T montre à quel point délectation et raison s’allient avec bonheur. Sur la route comme dans l’assiette.

   

Porsche 718 Cayman T
Consommation de carburant en cycle mixte : 9,0–8,6 l/100 km
Émissions de CO2 en cycle mixte : 204,0–194,0 g/km
Catégorie d’efficacité énergétique : F
La consommation et les émissions de CO2 ont été mesurées conformément à la nouvelle procédure WLTP.

Un samedi matin à la fin de l’été dernier, c’est l’aube et Zurich s’éveille à peine, comme cela nous semblait encore banal jusqu’en mars de cette année. Le trafic reprend doucement, les premières boutiques ouvrent leurs portes, l’activité urbaine commence à redémarrer. Dans la boucherie de la famille Hatecke et le bistrot attenant, situés directement sur la Löwenplatz, les affaires battront bientôt leur plein. C’est que le lieu est réputé pour sa viande d’excellente qualité et sa carte raffinée. Pour l’heure, un espresso suffira : la journée ne fait que commencer.

Bien sûr, nous pourrions nous faufiler discrètement dans la circulation matinale au volant de notre Porsche 718 Cayman T. Ou encore remiser ce sportif ultra-maniable à moteur central au parking le plus proche et utiliser ses deux espaces de rangement, devant et derrière, pour une généreuse virée shopping. Ou bien faire précisément ce que le Cayman sait faire de mieux, en nous propulsant pour quelques heures hors du quotidien : gagner l’autoroute, sortir de la ville, et prendre la direction de l’Engadine.

Magicien des virages : Le 718 Cayman T semble avoir été créé exprès pour les petites routes aux innombrables virages de l’Engadine.

Là-bas, nous avons l’intention de nous livrer à une quête bien particulière, et même double : nous voulons revenir aux origines de la fascination, de la tradition et de la qualité artisanale la plus poussée. En ouvrant en 2017 une filiale à Zurich, la boucherie-charcuterie Hatecke de Scuol, dans les Grisons, s’est aussi fait un nom en plaine, où elle est parvenue à s’affirmer malgré une concurrence rude. Dans la catégorie des voitures sportives, qui plus est le modèle T, jouit lui aussi d’une solide réputation, entièrement fondée sur l’expérience épurée de la conduite sur route. Sur le chemin de l’Engadine, il en apporte tranquillement la preuve éclatante : le 718 Cayman T avale les kilomètres d’autoroute avec une décontraction exemplaire. Ce n’est qu’après la sortie de Thusis qu’il semble prendre réellement vie. Dès les premiers virages, et malgré l’humidité de la chaussée qui monte vers le lac de retenue de Marmorera, il laisse entrevoir sa qualité fondamentale : un équilibre parfait, partout, et en toutes circonstances.

Équilibré et sensible

Mieux vaut être que paraître :

Mieux vaut être que paraître :

Discret, le 718 Cayman T mise sur de vraies valeurs — à l’instar de la boucherie-charcuterie de la famille Hatecke. Dans les deux cas, qualité et plaisir sont à l’honneur. Sans artifice.

Le moteur Boxer quatre cylindres placé au centre du véhicule, en position basse, permet au 718 de s’engager joyeusement dans chaque virage et de filer avec une agilité fascinante vers les sommets. Même là où le terrain se fait glissant, ce modèle épuré reste parfaitement maîtrisé et transparent. À chaque instant, il signale au conducteur où en est l’adhérence des pneus. Dans le brouillard matinal, le col du Julier émerge d’une solitude presque irréelle. Ici, rien ne distrait de la conduite : nature, conducteur et véhicule fusionnent en une expérience parfaitement pure. Et ce silence qui vous submerge ! Il n’y a pour le briser que le léger tic-tac du moteur refroidissant sur le parking.

Prochaine étape : Saint-Moritz, petite station alpine ultra-chic, synonyme de repos, de luxe et de plaisir. Une triade emblématique de la petite boutique Hatecke, en centre-ville, où tout est fait pour ravir les sens. Comme à Zurich, on peut acheter viande et charcuterie au comptoir, ou déguster un plat à l’une des quelques tables du bistrot. Le classique du lieu est le tartare de bœuf façon Hatecke. Le filet de bœuf d’excellente qualité est haché à la main à l’aide d’une lame fine, puis assaisonné d’un subtil mélange d’épices.

Soigneusement mis en forme sur une grande assiette blanche, le tartare est servi sans fioriture inutile : ni oignon, ni cornichon, ni bouquet de salade pour perturber la dégustation de cette viande unique. Visuellement et culinairement, toute concurrence est abolie.

N’est-ce pas un concept identique à celui du 718 Cayman T ? Dans le coupé Porsche aussi, la conduite se déguste et se passe de tout accompagnement superflu. Le modèle T est doté en série d’une boîte manuelle à six rapports, et partage le moteur turbo de 2 litres et 300 ch avec la version de base. Le châssis sport abaissé de 20 mm, le blocage transversal sur l’essieu arrière et les pneus légers de 20 pouces apportent un piment subtil.

Équipé de la sorte, le modèle T est la monture idéale pour partir à l’assaut des fabuleuses routes de montagne d’Engadine. Épuré à l’extrême, ce véhicule à deux places est d’une agilité et d’une rapidité étonnantes. Jamais il ne terrasse le conducteur d’une puissance excessive, incontrôlable. La sonorité du moteur se développe en continu au lieu de hurler inutilement sa potentielle performance à la face du monde. Il se contente de signaler avec fiabilité combien de puissance il a encore en réserve, sans attirer les regards furieux des vacanciers en quête de tranquillité. Sportif par sa rigidité, le châssis ne tombe pas pour autant dans le piège d’une dureté tape-à-l’œil. D’où, peut-être, une impression peu spectaculaire lors des premiers mètres parcourus au volant de ce 718 Cayman T. Mais de virage en virage, il compose peu à peu un tableau qui ne saurait être plus précis : ici, c’est le conducteur qui est au centre, et à chaque mètre, le lien entre l’homme et la machine se fait plus étroit, plus intense.

« La viande doit être esthétique. » Ludwig Hatecke

Plaisir et respect

Entre le 718 Cayman T et le conducteur, pas de coup de foudre immédiat. Le plaisir naît lorsqu’on comprend qu’ici, seules les meilleures pièces ont été assemblées et précisément ajustées les unes aux autres. Ce dont on s’aperçoit aussi en redescendant la route du col de l’Ofen : le système de freinage de cette Porsche légère (à peine 1,4 tonne) révèle alors son endurance et crée une belle relation de confiance sur cette route étroite, parachevant le portrait d’une voiture de sport réellement parfaite.

Nous poursuivons notre chemin, par des routes de campagne aux courbes souples, jusqu’à Scuol. La source même de la tradition Hatecke. Ici aussi, un seul principe : la réduction à l’essentiel. À Scuol, le comptoir de la boutique Hatecke n’a pas grand-chose à voir avec celui d’une charcuterie lambda. Les produits sont exposés avec précision en quantités réduites, quasiment mis en scène. « La viande doit être esthétique », explique Ludwig Hatecke, chef senior, troisième génération à diriger l’entreprise familiale. Succéder à son père dans cette fonction n’a pas toujours été une évidence pour lui. « À l’époque, le métier de boucher-charcutier était rude et pas très glamour », se souvient-il.

Classiques à maturité :

Classiques à maturité :

Le salsiz, de forme triangulaire, est l’un des grands classiques des salaisons Hatecke. Sa recette traditionnelle a été perfectionnée au fil des ans, comme les voitures de sport Porsche.

Pourtant, il a finalement décidé de poursuivre la tradition familiale. « Je serait boucher, mais un boucher qui conçoit son métier dans le plus grand respect », s’est-il dit. Ce principe traverse sa philosophie comme un fil rouge. La viande vendue dans les établissements Hatecke, aujourd’hui au nombre de quatre, provient de 120 exploitations paysannes d’Engadine. D’animaux passant le maximum de temps au pâturage, nourris exclusivement à l’herbe, sans aliments concentrés. Ce qui est propice au bien-être animal est en même temps décisif pour la qualité de la viande. En effet, la viande des animaux qui mangent exclusivement de l’herbe naturelle contient nettement plus d’acides gras insaturés, ce qui la rend plus saine.

L’origine régionale présente un autre avantage : la brièveté des transports. Les bêtes n’ont pas à parcourir de longues distances, stressées, en camion. Là encore, c’est une forme de respect envers l’animal, et ce respect se poursuit lors de l’abattage et de la préparation de la viande. « Notre volonté est de proposer toujours la meilleure qualité possible. Car si au final, le produit n’a pas de goût, l’animal a été abattu pour rien », conclut Hatecke. Selon ce credo, la viande est transformée dans la boucherie, au centre du village ancien de Scuol. Suspendue, pressée ou séchée dans des caves rocheuses, elle va donner la célèbre viande des Grisons ou l’excellent salsiz, de forme triangulaire. La viande séchée, surtout, est une tradition ancestrale de l’Engadine. « Autrefois, c’était la seule possibilité de la conserver », explique Hatecke. On consommait surtout de la viande en automne, quand les vaches descendaient des alpages. Et même alors, en quantités limitées. Aux yeux du boucher, cette attitude reste juste et importante. « Il ne faut pas manger de la viande tous les jours. Ca doit être quelque chose de rare, que l’on apprécie à sa juste valeur. »

Une voiture de sport telle que le 718 Cayman T doit elle aussi s’apprécier à sa juste valeur. On a le droit, bien entendu, de le conduire tous les jours, ce qui permet de se rendre compte de ses  qualités au quotidien, puisque lors du test, il ne consomme que 8,1 l/100 km. Mais c’est dans les moments particuliers qu’il révèle ses véritables atouts : quand il s’agit exclusivement de se concentrer sur le plaisir de conduire. Comme lors de notre trajet retour vers le Plateau par le col de la Flüela.

Philipp Aeberli
Philipp Aeberli